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Freddy Morezon + Un Pavé dans le Jazz

Ils s’associent pour fêter ensemble leurs 15 ans d’anniversaire !

18 min readOct 2, 2017

8 et 9 avril au Théâtre du Pavé

Entretien avec Claire Dabos *Freddy Morezon*
et Jean-Pierre Layrac *Un Pavé dans le Jazz*

Graphisme — Éveliina Laitinen

Comment vos associations sont-elles nées, comment ont-elles été créées ?

Jean-Pierre Layrac : « Ce sont souvent des histoires de rencontre. J’étais dans les Hautes-Pyrénées à ce moment là, on avait déjà commencé un travail sur le festival de Luz. En revenant à Toulouse, je regardais ce qu’il s’y passait et il y avait de toute évidence un créneau qui n’était pas exploité, celui du jazz moderne, jazz contemporain, du le jazz français etc., il nous paraissait évident qu’il y avait une place pour un projet comme ça. Après, ce qui provoque l’histoire, c’est qu’à ce moment là, Francis Azéma qui est un ami de longue date, a eu l’opportunité de prendre le Théâtre du Pavé. De suite je me suis dit que c’était peut-être possible de lancer une aventure. Pour lui c’était génial donc l’aventure est partie. Après, il restait à s’entourer de passionnés, et là ça n’a pas été très difficile. Il se trouve que la mairie de Toulouse et Marie Déqué, et je leur rends hommage, ont cru à notre projet de suite, un projet qui était quand même marginal, elle nous a donné une subvention puis l’aventure a pris son envol. On a rencontré le public assez vite, c’est aussi ce qui fait que le projet était assez facile à défendre, on savait qu’il y avait une attente de ce jazz un peu absent à Toulouse.

Par rapport à Freddy Morezon, le Pavé dans le Jazz est une association qui fait essentiellement de la programmation ?

J-P : Je vais être franc, à l’époque je ne savais pas du tout que Freddy Morezon existait. On s’est rencontré assez vite, forcément, car on était un peu sur les mêmes musiques. C’était Sophie Bernard qui avait lancé Freddy Morezon, on a été amené rapidement à se rencontrer puisqu’on souhaitait aussi travailler avec les musiciens du coin. Mais la création de Freddy Morezon et la notre sont complètement dissociées. Nous on faisait tout ce qui est diffusion, on voulait chercher un public et faire exister le jazz contemporain sur Toulouse. Ça paraît un peu prétentieux, mais il y a avait très peu de choses qui se passaient : à l’époque, des gens comme Sclavis qui sont devenus des vedettes, ils ne passaient pas trop à Toulouse. C’est assez surprenant, il y avait vraiment quelque chose à faire, et le public a répondu présent de suite.

Et comment est né Freddy Morezon ?

Claire Dabos : Freddy Morezon est né il y a 15 ans autour d’un noyau d’artistes. À l’époque, au départ de Freddy Morezon, ce n’était pas uniquement axé sur la musique. Il y avait vraiment deux pôles, autour de la musique et du conte. C’est né entre autres autour de Marc Démereau et certains musiciens avec qui il travaillait depuis longtemps, et autour d’un conteur, Didier Kowarsky qui travaille encore aujourd’hui avec Marc. Tout ce noyau de musiciens a composé La Friture Moderne et plus tard Le Tigre des Platanes qui étaient des groupes assez forts à Toulouse il y a 15 ans. Les musiciens ont senti un fort besoin de se structurer et là aussi c’est une histoire de rencontre, puisqu’ils ont rencontré Sophie Bernard qui avait vraiment envie de prendre les choses à bras le corps et qui a réussi à fédérer une structure associative autour de ces musiciens, générer une reconnaissance des institutions, et obtenir des financements publics à destination de ce groupe d’artistes.

Freddy Morezon a la particularité d’être une association et un collectif, vous programmez uniquement les musiciens qui sont dans le collectif c’est bien ça ?

Claire : Contrairement au Pavé, Freddy Morezon Prod n’a pas du tout à priori une vocation à faire de la diffusion. L’association est là pour accompagner les musiciens, dans des recherches de financements pour monter des créations, dans des recherches de partenariats pour trouver des accueils en résidence, tout un travail de communication autour de leurs projets. En cours de route on a également monté un label pour vraiment maîtriser le processus, du départ de la production, diffusion, communication, et édition, pour être maître de l’ensemble de la filière. On travail aussi sur un volet d’actions culturelles. À priori notre vocation est surtout là, et c’est assez exceptionnel d’organiser nous même des concerts, hormis cette année 2017 pour nos 15 ans où l’on met en place cette série d’évènements pour nos 15 ans. Ça nous arrive aussi ponctuellement quand on veut mettre en valeur des projets qui sont importants mais la vocation de l’association c’est d’être un accompagnement sur le long terme de ce collectif de musiciens Toulousains.

Le Pavé est donc orienté vers le Jazz contemporain, Jazz moderne, comment définissez-vous vos identités musicales ?

J-P. : On est toujours obligés de mettre des appellations lorsqu’on veut parler de ce qu’on défend, mais c’est toujours un piège car c’est difficile de mettre des étiquettes sur les musiques. Quand on dit jazz contemporain, c’est vrai que c’est ça, mais en même temps c’est très vague. Nous ce qui nous intéressait dans l’aspect jazz contemporain, c’est ce qui se faisait, la création de l’époque. C’est à dire, les musiciens qui à ce moment-là créaient une musique. Il y avait des tendances sur le jazz Français, à l’époque des Corneloup, Kassap, il y avait presque un style de jazz français. Il y avait tout un tas de formes de musiques très différentes autour du jazz et on avait vraiment envie d’aller explorer, d’aller défendre tous ces aspects, pourvu que ça soit ce qui existe au moment. On n’était pas sur le jazz traditionnel tels qu’ils le pratiquent à certains endroits. Nous ce qui nous intéressait c’était l’histoire, ce qui se passait à l’instant sur le plan national et international. Après on ne faisait pas venir que des musiciens français, je parle beaucoup du jazz français mais il y avait beaucoup de musiciens Européens et des musiciens de la région. Des fois ce n’était pas un type de jazz, il y avait vraiment des choses très différentes, mais c’était actuel.

Claire : Par rapport à Freddy Morezon, c’est aussi un collectif qui regroupe plusieurs facettes de musiques, déjà par la diversité des musiciens qui composent le collectif, puisqu’on va trouver des musiciens qui viennent vraiment du jazz, du free jazz, des musiciens qui viennent des musiques improvisées, d’autres qui sont plus axés sur le rock expérimental, il y a tous les projets que continuent Marc Démereau avec Didier Kowarsky, qui mêlent paroles et musique etc. Après je pense que ce qui fait le point commun et une esthétique commune à tous ces projets, c’est d’une part, un fort engagement dans la création, un vrai engagement artistique, une vraie recherche, une vraie présence, et d’autre part tous les musiciens de Freddy Morezon ont un dénominateur commun, c’est que tous cherchent à s’approprier un matériau, une référence, quelque chose qui pour chacun de ces musiciens, fait un moment clé de leur histoire de la musique, de comment ils ont vécu l’histoire de la musique, et ces références sont réappropriées avec leur langage de musiciens improvisateurs ou de musiciens contemporains. On a vu passer chez Freddy tout un travail sur la musique Éthiopienne, un travail sur Charles Mingus, là en ce moment il y a un travail sur la folk-anglo-saxonne, il y a eu un travail sur la musique répétitive à partir de pièces de Terry Riley, il y a eu beaucoup de travail de Marc Démereau autour du free jazz, autour de l’Art Ansemble of Chicago, Pharoah Sanders etc. avec le projet Ostaar Klaké. Je pense que c’est vraiment un point qu’ils ont tous en commun, de s’approprier un « patrimoine » et de le relire avec leur individualité, leur identité, un langage plus contemporain.

Vos associations ont toutes les deux un engagement envers la scène locale, mais elle côtoient l’international, pouvez-vous nous en parler ?

J-P. : Les points communs sont évidents, c’est qu’on émet un peu les mêmes musiques. C’est à dire quand on parle de toutes les créations de Marc Démereau, ça correspondait aux musiques que nous aussi on avait envie de diffuser, donc c’est vrai que le rapprochement paraissait évident. Après, nous on allait chercher des musiciens de l’extérieur. Évidemment, eux c’est plutôt l’inverse, le but c’est de faire que les musiciens Toulousains puissent se faire connaître à l’extérieur. Ça nous intéressait aussi, on aimait bien amener des programmateurs étrangers, on se dit qu’on va leur faire connaître les musiciens du coin. C’est un peu le but, on travaille quand même nous aussi sur cet export Toulousain. On était donc associé dans cette aventure, de façon assez naturelle.

Claire : Par rapport à Freddy Morezon, les choses ont un petit peu bougées aujourd’hui, mais c’est vrai qu’au départ de l’association, les musiciens qui ont composé le collectif étaient tous basés sur Toulouse. Après la vie à fait que certains ce sont éparpillés sur le territoire régional voir national, et puis le collectif a accueillit d’autres personnes qui viennent plus de l’extérieur, mais le noyau de base était sur la scène locale Toulousaine. Par rapport à d’autres grandes villes où les scènes locales s’appuient souvent sur des clubs forts ou des lieux de diffusion de jazz forts, comme le Petit Faucheux à Tour, le Pannonica à Nantes, le Périscope à Lyon, des endroits vraiment importants pour vitaliser cette scène, ici à Toulouse, on se tourne vite vers le seul interlocuteur qui diffuse ce genre de musique dans des conditions professionnelles, c’est le Pavé dans le Jazz. Donc dès le départ dans la vie du collectif, c’était assez spontanément qu’on s’est tourné vers le Pavé pour trouver une porte de diffusion sur nos musiques : en tout cas localement, à part eux c’est assez difficile.

J-P. : En même temps, on a jamais été officiellement associé. On se retrouvait forcément sur les mêmes musiques mais on n’avait aucun lien, on n’était pas obligé de programmer les groupes de Freddy Morezon, sinon on aurait fait qu’une association, ce n’était pas le but. Mais on n’avait pas les mêmes objectifs, eux c’est vraiment défendre les artistes, la production des artistes, et nous c’est de diffuser. Une de nos priorités, quand on faisait venir des musiciens de renom national ou international, c’était de toujours avoir un double plateau avec des musiciens régionaux. Ça permet aux musiciens de jouer devant un public un peu plus important, ça nous paraissait évident.

Vous dites beaucoup que vous défendez les mêmes musiques, que vous avez été amenés à vous rencontrer par vos convictions, pouvez-vous nous expliquer un peu plus clairement quelles sont ces convictions?

J-P. : On se méfie du conflit d’intérêt (rires), on reste vraiment deux structures différentes, c’est important. Mais comme on est très proche, on fête notre anniversaire ensemble, ça veut dire qu’on est quand même un peu dans le même bateau, chacun avec un travail différent.

Claire : Je pense qu’autant au Pavé dans le Jazz que chez Freddy Morezon, ce qui importe les deux structures est de défendre les musiques qui sont loin de l’industrie du disque, de l’industrie de la musique, des courants dominants, de ce qui passe à la radio, de la rentabilité etc. Dans les deux cas, on se situe complètement hors de ce circuit, et ça nécessite peut-être plus de soutien des financements publics et plus d’engagement de la part des deux parties pour pouvoir tenir le projet à bout de bras. Je pense qu’il y a quand même une démarche éthique de mettre en avant, soutenir et défendre des musiques qui ont besoin d’aide puisqu’elles ne sont pas spontanément sur le devant de la scène. Les projets qu’on défend, ils ne passent pas sur FIP ils ne passent pas à la télé, ils ne passent pas dans les Inrocks dans Libé etc. c’est quelque chose qui par nature est beaucoup plus confidentiel et a besoin d’un travail de fond de la part des opérateurs, que ce soit côté artistes chez Freddy Morezon, où côté diffusion au Pavé.

J-P. : C’est vrai que ça reste un peu plus confidentiel, justement parce qu’on est en dehors de la culture marchande, on va chercher un public. Mais que ça soit autant Freddy Morezon que le Pavé, notre but n’est pas de se cantonner à ça, se dire « on a notre public, on est dans notre monde, on est heureux », notre préoccupation n’est pas de rester dans notre noyau de « connaisseurs », mais d’aller chercher les publics, et sans faire de concessions, en défendant les mêmes musiques. Quand je dis qu’on est dans le même bateau, si Freddy Morezon touche des nouveaux publics ça va se répercuter sur nous aussi, et inversement. Et je crois qu’au bout de 15 ans, on a quand même touché des gens qui au départ n’étaient pas du tout branchés sur ce genre de musique, et ça on en est très fiers. C’est ce qui nous intéresse le plus d’aller chercher des nouveaux publics, mais ce n’est pas pour ça qu’on va faire venir une grande star, on reste quand même sur nos convictions on ne va pas aller chercher le public n’importe comment, on reste sur ce qu’on a envie de défendre.

Comment avez-vous décidé de fêter votre anniversaire ensemble ?

J-P. : Je ne sais pas, quand je dis qu’on est dans le même bateau, on se retrouve sur les concerts, on est dans la même sphère, il se trouve qu’on fête les 15 ans en même temps c’est quand même quelque chose… on ne s’est même pas posé la question, ça paraissait évident à tous le monde, on vit un peu la même aventure. Mais nous sommes bien deux associations, c’est Freddy Morezon et Un Pavé dans le Jazz qui fêtent un anniversaire. Ça je crois que c’est le message qu’on peut faire passer, ce n’est pas en fusion.

Vous n’avez quand même pas tout à fait les mêmes esthétiques ?

J-P. : On se comprend en tout cas.

Vous vous comprenez, mais vos deux esthétiques sont différentes, sur certains points vous vous rejoignez, par exemple sur Iana ou sur Marc Démereau, mais certaines esthétiques des projets de Freddy sont plus axées …

J-P. : Axées, si on regarde la programmation du Pavé dans le Jazz, c’est très diversifié. On peut aller de musiques très improvisées, très minimalistes, aux concerts qui se rapprochent du jazz, on aime bien ça. Par exemple la musique improvisée, il y a quand même une famille, un univers, quelque chose de fort autour, il y a des musiciens qui restent uniquement là dedans, et il se trouve qu’à Toulouse il y a toujours eu beaucoup de musiciens qui jouent des musiques improvisées et il nous arrive de travailler avec eux. Je veux dire, c’est un domaine qu’on n’ignore pas, mais on ne va pas défendre uniquement des musiques improvisées. Même Freddy Morezon, quand on voit Iana, Christine Wodrascka, ce sont des musiciennes qui sont vraiment dans la musique improvisée.

Mais par exemple Facteur Sauvage ou Didier Kowarsky ?

J-P. : Facteur Sauvage ce n’est pas une musique qui nous est complètement étrangère, même si c’est du rock, par exemple, là, on va travailler avec Sonic Protest, sous des formes très rock. Je veux dire que c’est large le type de musique qu’on programme.

C’est vrai que vous vous associez aussi pour d’autres événements, avec des esthétiques qui peuvent fusionner entre les différentes associations, avec Myrys par exemple ?

J-P. : Avec Myrys, c’est ça, on va chercher des publics un peu plus proches du rock et des musiques alternatives. Mais on fait un travail avec eux aussi car ça permet de tisser des liens, de casser les fameuses cloisons. Puis on s’aperçoit que des gens peuvent écouter du rock, et à un moment donné aller écouter un peu de free jazz. C’est ça qui est intéressant, quand je dis « aller chercher des nouveaux publics », tout le monde classe dans des catégories, en travaillant avec d’autres gens, ça fait une synergie, on échange les publics, et c’est intéressant, c’est comme ça qu’on avance.

Claire : Par rapport à la connivence qu’il y a sur certains projets plus que d’autres, certains projets de Freddy Morezon vont être diffusés par le Pavé. Là où on se retrouve le plus dans ce cas, c’est sur les projets qui sont vraiment issus du jazz improvisé. Peut-être que c’est aussi parce que pour Freddy Morezon, diffuser des projets qui tirent plus sur le rock, le rock expérimental, ou d’autres plus en lien avec la parole, ou avec la pop comme Aquaserge, on a moins besoin de ce soutien précieux qu’est le Pavé dans le Jazz, car on peut s’adresser à d’autres structures locales. Je pense qu’on privilégie aussi ce partenariat en ciblant vraiment ces projets de jazz improvisé parce qu’à Toulouse, vraiment, il n’y a que le Pavé qui peut diffuser ça.

J-P. : Je prends un autre exemple, le Pavé fait parti par exemple d’un réseau qui s’appelle l’AJC, ça veut dire qu’on a des réunions, des assemblées générales où l’on rencontre des gens qui font le même travail sur d’autres villes, ou à travers des festivals, ou à travers des programmations à l’année comme nous. C’est évident que naturellement on est un peu ambassadeurs, à ce moment-là de la scène locale, mais c’est naturel, c’est parce qu’on on a envie aussi d’échanger les musiciens qu’on a dans nos villes.

En fait, ce sont uniquement les rôles de vos associations qui diffèrent?

J-P.: La finalité n’est pas la même, et c’est pour ça que ça restera toujours deux choses très différentes. Par contre comme on défend souvent les mêmes musiques, on est amené à croiser et à s’entraider.

Cette solidarité correspond aux convictions de vos associations, hors du fait que vous soyez en partenariat ?

J-P. : Ce n’est pas le sujet là, mais on peut ajouter aussi Jazz à Luz là-dedans, que ce soit Freddy Morezon ou le Pavé, on est très à l’écoute de ce qui se fait à Luz. Dès qu’il y a une production de Freddy Morezon qu’on voit à Luz ou au Pavé on est très à l’écoute. Pour nous c’est hyper important de défendre la scène locale.

Pouvez-vous nous parler de la programmation du week-end des 15 ans ?

J-P. : Justement, on a essayé de bien montrer qu’il y a les deux associations, de faire que les deux soient bien identifiées, mais on est tellement proches que finalement il y a un moment où l’on se demande « est-ce que c’est le Pavé ou est-ce que c’est Freddy Morezon qui programme ça ?». Il y a des groupes qui font partis du catalogue Freddy Morezon et d’autres groupes qui viennent de l’extérieur, forcément amenés par le Pavé. On a essayé de faire un équilibre c’est un peu le but non ?

Claire : Chez Freddy on a essayé de profiter de ces deux jours de programmation pour montrer un peu toutes les facettes du collectif, différents musiciens qui constituent le groupe, et c’est aussi pour certains une occasion de tester de nouvelles choses puisqu’on va avoir entre autre un projet de Marc Démereau, Stryx Nébulosa, un nouveau travail qu’il impulse avec deux autres musiciens. À l’opposé de No Noise No Reduction qui travaille sur les graves, là ils vont explorer les sons aigus. C’est aussi l’occasion de montrer un projet de Sébastien Cirotteau, Sweetest Choice qui est sur un tout autre registre. Eux travaillent à partir d’un répertoire Baroque, un travail sur l’émotion sur l’idée de la solitude, de la nuit, du noir, et on a aussi un petit clin d’oeil avec Florian Nastorg au But Rennais où on est vraiment sur du free jazz bourré d’énergie « à fond les ballons », et ils travaillent à partir d’un match de foot.

J-P. : Ça montre bien l’éventail de musiques, les différents aspects, il n’y a pas un type de musique Freddy Morezon, il n’y a pas un type de musique Un Pavé dans le Jazz. Sur les deux jours, on va avoir des choses très différentes.

Claire : Le lendemain, Freddy programme Bedmakers qui effectivement pourrait être un projet Pavé, largement, c’est une production avec Robin Fincker et Fabien Duscombs qui sont deux membres assez phares du collectif.

J-P. : Après de l’extérieur, In Love With avec le fameux Théo Ceccaldi qui est un musicien qu’on voit dans beaucoup de projets, évidemment, qui est mis en lumière un peu partout et qui est super intéressant, ce n’est pas un hasard, là aussi il y a un petit clin d’œil parce qu’il y a Sylvain Darrifourcq qui est dans le trio, un ancien Toulousain.

Claire : C’est lui qui est porteur du trio quand même !

J-P. : C’est lui qui est porteur du trio oui et c’est aussi intéressant à ce niveau-là, quand des musiciens sont partis à Paris, de temps en temps on se les approprie encore un peu, on se dit qu’ils sont encore un peu Toulousain.

Sylvain Darrifourcq est dans un projet en trio chez Freddy aussi non ?

Claire : Sylvain Darrifourcq travaille sur un projet avec Robin Fincker et Benoit Delbecq qui avait été créé l’année dernière à la Salle Bleue, et qui va repartir en deuxième phase de création en 2017, effectivement c’est encore une connivence qu’on peut trouver là. On trouve aussi Jean-Luc Cappozzo et Paul Rogers le samedi soir, tous les deux sont des musiciens qui ont pu croiser d’autres de Freddy Morezon comme Robin, Fabien, Sébastien, Piero Pépin, Christine qui a beaucoup joué avec Jean-Luc …

Finalement Le But Rennais n’est pas un projet porté par Freddy, c’est Florian qui fait partie du collectif ?

Claire : Voilà le projet n’est pas porté par Freddy Morezon mais on travaille beaucoup avec Florian.

J-P. : Après ça n’empêche pas, il y a des musiciens pour qui certains projets sont chez Freddy Morezon et qui travaillent sur d’autres projets, un musicien n’est pas lié à une association.

Oui bien sûr, donc là quand vous dites que vous avez essayé de bien démarquer ce que produit Freddy et ce que programme le Pavé, c’est vraiment au niveau des projets qui sont portés actuellement par Freddy et ceux qui en sont extérieurs ?

J-P. : Oui c’est cet équilibre, évidemment le trio de Jean-Luc Cappozzo, ce ne sont pas des musiciens Toulousains, mais on reste quand même sur une certaine cohérence sur les deux jours, avec des musiques qui vont un peu dans le même sens, en étant très différentes bien sûr, c’est ce qui est intéressant. Après, le public ne va pas se dire « ça c’est Freddy Morezon, ça c’est le Pavé » ce n’est pas trop le but, ils passent deux jours avec nous et on fait quelque chose ensemble.

D’ailleurs cette configuration deux jours ça fait comme un petit festival ?

J-P. : Voilà un mini festival on peut dire ça.

Donc il va y avoir une conférence et une exposition de photographies c’est ça ?

J-P. : Voilà donc il y aura une expo photo, une conférence, la musique ça s’écoute mais si on peut en parler…

L’exposition photo va être ciblée sur des concerts qui se sont passés à Toulouse ?

J-P. : Oui complètement, puisque Michel Laborde est un photographe qui est fidèle aux concerts du Pavé dans le Jazz depuis de très nombreuses années, d’ailleurs pratiquement depuis le début, c’était l’occasion de lui demander de faire un écho à sa manière de différents moments importants de ces quinze années.

Claire : quinze ans, quinze photos !

Et pourquoi avez-vous choisi de faire venir un conférencier, il y a une volonté de discussion, de pédagogie?

J-P. : Quand je dis « la musique ça s’écoute mais on peut en parler aussi », je crois que le public est naturellement intéressé par ce que peuvent dire des musiciens ou des musicologues sur les démarches des musiciens etc., lorsqu’on fait un concert c’est un peu difficile de faire coller une conférence mais puisqu’on a un temps où les gens peuvent être là à écouter plusieurs concerts, on a tous pensé que c’était intéressant. Il y a vraiment des gens qui ont des choses intéressantes à dire, puis Ludovic Florin qui fait partie de l’association côtoie beaucoup de gens qui font des conférences sur la musique et c’est intéressant, tout le monde est gagnant, vraiment.

Claire : Oui je pense que c’est aussi dans la lignée de tout le travail que fait le Pavé sur l’action culturelle sur la sensibilisation, proposer des masterclass, des discussions, des rencontres, que ce soit à l’UFR de musicologie, à Job, au Goethe institut, il y a quand même une tradition au Pavé de sortir du simple processus de diffusion, et d’aller un peu plus loin en travaillant de manière plus large.

J-P. : la diffusion seule ce n’est pas suffisant, et c’est vrai que quand on a travaillé avec la fac c’était aussi intéressant d’aller travailler avec les étudiants, qui étaient parfois de la même génération que les musiciens.

C’est quand même une conférence sur la mise à mal de l’esthétique c’est intéressant !

Claire : c’est carrément passionnant mais c’est vrai que ça va aussi dans le sens de ce qu’on défend des deux côtés, on est sur des musiques où le but de la musique n’est pas de faire joli mais c’est de procurer des sensations, procurer des émotions, on est vraiment au delà du beau et je pense que le jazz est vraiment la musique qui permet ça, je pense que ça viendra éclairer cet aspect là de ce qu’on peut produire chez Freddy.

J-P. : Peut-être que ceux qui assisteront à la conférence ne verront pas les concerts de la même manière, de toute façon c’est intéressant à tout niveau, ça c’est un plus, c’est évident.

Donc c’est le 8 et le 9 avril au théâtre du Pavé, c’est le soir ?

Claire : en fin d’après midi 18h, on finira par danser.

J-P. : c’est bien que les choses se terminent par la fête ! »

Propos recueillis par Sarah Brault
Entretien publié dans ImproJazz Magazine, n°234, avril 2017
Remerciements à Ludovic Florin

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Sarah Brault
Sarah Brault

Written by Sarah Brault

Amatrice de concerts, de musique et de musicologie, je suis particulièrement intéressée par les musiques improvisées et contemporaines.

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